De l’alien à l’expert de soi
- Nadia Gendre
- 9 juin 2024
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 11 août 2024
De l'importance de l'émotionnel et du relationnel
La plupart d’entre nous sommes des experts confirmés dans notre domaine d’activités. Protégés par des diplômes, une large expérience, nous nous sentons relativement en sécurité avec nos compétences professionnelles. En revanche, dès qu’il s’agit d’ôter notre armure professionnelle pour laisser entrevoir, ne serait-ce qu’une infime parcelle de soi dans ce même contexte, ça se complique. Nous ressemblons alors davantage à des aliens débarqués sur une planète inconnue et ayant perdu tout repère de communication.

Pourquoi je vous raconte ça ? J’ai privilège d’intervenir dans la formation de spécialistes en santé et sécurité sur le thème du leadership SST (santé – sécurité – travail) où nous travaillons notamment la conscience de soi et la communication personnelle. Objectif : renforcer les compétences émotionnelles et relationnelles. Dans un contexte essentiellement masculin, basé sur des règles, des directives, des lois, vous imaginez bien que parler de soi, montrer des émotions ou pire encore une once de vulnérabilité, peut relever du défi !
Défi #1 Accepter que l’être humain n’est pas prévisible à 100%
Dans un exercice, les participant.e.s doivent confier leur kryptonite (cette pierre verte qui met Superman en difficulté). Réponses de la majorité : l’inconnu, l’imprévu, tout ce qui n’est pas planifié… Aïe. Travailler avec l’être humain, c’est justement accepter une part d’inconnu, de « non maîtrisable » chez l’autre. Mais aussi chez soi. Nous cachons en nous pleins de petits secrets non identifiés et non acceptés. Mieux communiquer implique donc d’explorer notre propre fonctionnement, nos émotions, nos conditionnements, nos croyances, nos biais et nos représentations mentales qui peuvent nous jouer de sacrés tours dans l’interprétation d’une situation ou la perception d’une personne.
Défi #2 : Mettre de la conscience sur ce qui nous anime
A quoi ressemble le leader SST idéal ? Quelle est sa mission ? Sa contribution ? Ses valeurs, ses non-négociables, ses objectifs ? Quelle cause sert-il ? Cette introspection s’avère indispensable pour qui désire sensibiliser et donner du sens à ses actions de prévention. L’être humain fonctionne par effet de résonance, en termes de vibrations et d’énergie. Par conséquent, plus nous mettons de la clarté sur ce qui nous met en mouvement, nos caractéristiques, nos centres d’intérêts, le « pourquoi nous faisons ce que nous faisons » plutôt que sur nos compétences ou notre fonction… plus nous incarnons ce en quoi nous croyons et devenons ainsi un phare pour les autres.
Défi #3 : Reconnaître notre propre responsabilité.
Chaque pensée, chaque décision, chaque action, chaque conversation contribue à nourrir positivement ou négativement notre contexte de travail. D’où est-ce que ça part en moi lorsque je m’exprime ? De ma tête, mon égo, mon cœur ? Nous pouvons choisir de nous cacher derrière des règles, des ordres, des dysfonctionnements ou alors reconnaître notre pouvoir personnel à créer les conditions propices à la sécurité et nourrir en conscience le résultat souhaité. Chacun.e à son échelle co-crée sa réalité, en décidant de sa posture, ses actes. Lorsque nous comprenons cette dimension, nous quittons le mode alien pour devenir de puissants agents de transformation pour nos entreprises (et notre vie privée aussi d’ailleurs !).
Défi #4 Comprendre que l’exemplarité passe par la congruence
En prévention, nous parlons souvent d’exemplarité et donc de congruence. Ce qui signifie en des termes plus ésotériques : aligner sa tête, son cœur, son corps et son âme. Un exercice difficile dans notre environnement professionnel qui les fait plutôt travailler en silo. Pourtant, cet alignement est essentiel, car il renforce notre leadership, notre impact et notre justesse vis-à-vis des personnes autour de nous. Lorsque notre espace intérieur fonctionne en harmonie, il devient plus aisé d’avoir une communication personnelle éclairée, associant autant les impératifs liés aux bases légales, aux règles vitales, au planifiable qu’aux émotions, à l’imprévisible, à l’humain…
Développer l’expertise de soi n’est évidemment pas réservé qu’aux spécialistes en santé et sécurité. Car, pour co-créer une culture forte de la prévention, ils ont grandement besoin, à leurs côtés de leaders conscients, alignés et engagés en faveur d’un monde du travail plus sain et plus sûr.